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La culture du tabac résiste sur 160 ha en Pyrénées-Atlantiques



Publié le 05/09/2012 à 06h00 Par Renée Mourgues
Mise à jour : 05/09/2012 à 16h04
  • Éminemment estivale, la récolte de tabac est terminée. Les feuilles subissent l'épreuve du séchage, ici sous l'oeil de Christophe Congues, producteur à Moumour et secrétaire national de la Fédération des planteurs de tabac.
    Éminemment estivale, la récolte de tabac est terminée. Les feuilles subissent l'épreuve du séchage, ici sous l'oeil de Christophe Congues, producteur à Moumour et secrétaire national de la Fédération des planteurs de tabac. (Nicolas Sabathier)

En 2008-2009, la culture du tabac s'étendait sur 220 hectares des Pyrénées-Atlantiques. Désormais réduite à 160 ha, elle concerne aujourd'hui 45 producteurs contre… 300 en 1994.
Si la guerre déclarée au tabagisme et le diktat des multinationales ont affaibli le secteur, le coup fatal remonte à 2010 avec la perte des primes européennes qui obligèrent les acteurs de la filière à faire oeuvre d'imagination. La force de la profession tient à sa moyenne d'âge : 43 ans.
Seuls trois d'entre eux vivent du fruit exclusif de la tabaculture, les autres devant conjuguer plusieurs activités. C'est le cas de Christophe Congues, 39 ans, secrétaire national de la Fédération des planteurs de tabac. A Moumour, il consacre 7,5 hectares de l'exploitation familiale à l'herbe à Nicot : 5 ha de variété "Virginie" commercialisée par la coopérative de Tonneins et l'entreprise Traditab, et 2,5 ha de tabac brun destiné à la société Cigare de Navarre à Navarrenx (lire par ailleurs), tout ceci en complément de l'élevage et de la production de kiwis et maïs-semence.
"De 2000 à 2008, nous avons connu une période faste et puis ça s'est dégradé. En plus, en 2011, nous avons essuyé une mauvaise récolte. L'usine n'a pas pu faire de complément de prix. Il a fallu l'expliquer et ça a été très mal vécu. Nos gains de prix ont été mangés par les charges" observe le responsable national. L'avenir passe, semble-t-il, par une aide d'Etat à la qualité optimale des produits, cofinancée par l'Europe et défendue par Bruno Le Maire, ancien ministre de tutelle. "Elle s'élève à 20 % du prix. Sans elle, il y aura des plans sociaux" redoute Christophe Congues.
"Le tabac, c'est dix mois de travail sur douze. Pour le valoriser, on a décidé de se concentrer sur la qualité. Notre chance, c'est d'avoir eu des élus conscients de l'impact économique de la tabaculture" ajoute-t-il. Le salut vint, voici quatre ans, de la volonté de privilégier le tabac du terroir à travers Traditab, filiale de Tabac Garonne Adour (Tonneins) qui, par la promotion de sa marque de tabac à rouler "1637", déclaré 100 % naturel, contribue à assurer un revenu décent aux producteurs du sud-ouest, dont Christophe Congues. Décliné sous trois formes (blond, brun "feu de bois" et basque), "1637" représente 13 % des parts de marché en Pyrénées-Atlantiques et 1 % en France. Consommé par quelque 35 000 personnes, son nom commémore l'année de l'introduction du tabac en Aquitaine. Chaque mois, il s'en vend 9 tonnes.
"La consommation de tabac se segmente. Nous sommes entrés dans l'ère du raisonné et du raisonnable. On a appris à maîtriser l'eau et le traitement des cultures et à diminuer au maximum les résidus. Si je suis conscient des méfaits d'une consommation excessive, je n'oublie pas que le tabac, troisième impôt indirect de France, rapporte à l'Etat 13 milliards d'euros par an. On ferait mieux de réfléchir à éduquer les gens autrement que par la sanction" suggère Christophe Congues.
>> "Portes ouvertes à la ferme" le 15 septembre à partir de 10h à Moumour (23, rue Longue). Entrée libre.  05.59.39.43.05

>> La filière tabac en chiffres : La France compte 4 000 planteurs de tabac répartis sur 6 500 ha dont les 2/3 établis en Aquitaine et Midi-Pyrénées. Ils emploient 10 000 travailleurs saisonniers et produisent 14 500 tonnes/an : 97 % de variétés blondes (Virginie et Burley) et 3 % de tabac brun exportés dans une vingtaine de pays. Le monopole d'Etat se saborda en 1995 avec la privatisation de la Seita (Sté d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes) devenue en partie espagnole avec la fusion avec Altadis puis simple filiale du groupe britannique Imperial Tobacco.

>> A Navarrenx, la Maison du Cigare a reçu 3 000 visites en juillet et août
Interview de Thierry Frontère, repreneur de la manufacture "Le Navarre".
Dans quel contexte avez-vous repris l'affaire ?
On est arrivé après un échec. L'entreprise avait sorti son premier cigare en 2005. En septembre 2010, j'ai repris les actifs séparés : le fonds de commerce, la marque et les stocks. J'ai acquis le bâtiment et repris le personnel. Nous avons sept salariés à temps plein dont trois "rouleuses" cubaines.
Combien produisez-vous de cigares ?
En 2012, on aura vendu 60 000 cigares dont 10 000 dans les Pyrénées-Atlantiques et 80 % sur le marché français à travers 400 points de vente. Ça reste très petit comparé aux 12 millions de cigares consommés chaque année en France. On avance prudemment. Il faut que les gens se familiarisent avec le produit comme pour le caviar d'Aquitaine.
Quels projets majeurs ?
Mon espoir est de développer nos ventes à l'extérieur vers l'Asie, les Emirats, les Etats-Unis où l'embargo contre Cuba offre des perspectives, l'Europe, Saint-Martin et la Polynésie française. En octobre, nous partons en mission en Russie avec la CCI.
De quoi êtes-vous particulièrement fier ?
De l'engouement autour de la Maison du Cigare. Créée en octobre 2011, elle a accueilli 1 000 visiteurs en juillet et 2 000 en août. Les gens qui visitent la fabrication et le "Jardin du Tabac" deviennent nos ambassadeurs. Dans un univers décrié par le politiquement correct, ils retiennent la dimension économique et touristique. Le 19 décembre 2011, nous avons reçu le label "Entreprise du patrimoine vivant" délivré par l'Institut supérieur des métiers sous l'égide du ministère de l'artisanat. Une belle reconnaissance !
Comment travaillez-vous avec les producteurs locaux ?
On est les seuls à transformer le tabac-feuilles brun "spécial cigare" en produit fini à forte valeur ajoutée. Même si c'est anecdotique, cela tire la production vers le haut. Nous sommes liés par un contrat qui porte sur un niveau de qualité et des équipements précis. On produit ici une des plus belles capes (enveloppes du cigare) au monde.

2 commentaires:

  1. je ne savais pas qu'il y avait autant de tabac dans les pyrénées atlantiques ;)
    kevin.

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  2. Ah cet article me rappelle les joies du ramassage du tabac :) L'interview est intéressant, très bonne idée pour mieux connaître le métier!!
    Manue

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